[crédits photo : AFP]
En début de séance à l’Assemblée, le ministre phare de la réforme des retraites du gouvernement Macron a déclaré ce lundi 13 février qu’il y avait « 650 décès par an au travail, un chiffre relativement stable depuis 15 ans », et « un chiffre qui n’a pas bougé depuis 2017 », c’est-à-dire le début du premier quinquennat Macron. Avant d’ajouter hypocritement que « chaque mort est un mort de trop ».
Une déclaration qui minimise la souffrance au travail et qui lui a valu d’être traité d’imposteur et d’assassin par un député LFI. Branle-bas de combat dans l’hémicycle, scandale et suspension de séance : Dussopt exige des excuses et les députés de la majorité s’indignent. Le ministre s’est même fendu d’un tweet dénonçant « la violence » qui n’aurait « aucune place en politique. Physique ou verbale. »
Pendant que les parlementaires étaient plus choqués qu’un ministre soit traité d’assassin que par le nombre de morts au travail, on en oubliait pourtant la réalité, celle de la violence sociale : la France est la triste championne d’Europe de la souffrance au travail. Selon les statistiques de 2022, la mortalité au travail en France est deux fois supérieure à la moyenne européenne.
Selon les chiffres du ministère du travail lui-même, on comptait 476 décès en 2005, 542 en 2009 et 790 décès en 2019. Des chiffres glaçants et loin d’être aussi stables que le prétend Dussopt. D’autant que les chiffres des accidents du travail sont largement sous-estimés car les employeurs les sous-déclarent.
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Or, quoi qu’en dise Olivier Dussopt, la macronie n’est pas étrangère à cet état de fait. Réduction du pouvoir des syndicats et des représentants du personnel dans les entreprises, suppression des CHSCT, libéralisation à outrance, uberisation, travail des mineurs (dont le gouvernement se vante d’augmenter le nombre d’apprentis) : la croissance des morts au travail est le produit de choix politiques et de la toute puissance patronale dans l’entreprise.
Surtout, la réforme des retraites ne va faire qu’empirer cet état de fait, en soumettant encore plus les travailleurs à l’arbitraire patronal. Alors qu’à 64 ans, 25% des travailleurs les plus pauvres sont déjà morts, le gouvernement appuie sur la “nécessité” de repousser l’âge légal de départ à 64 ans. Usé par toute une vie de travail, beaucoup de travailleurs sont conscients qu’ils ne pourront tout simplement pas travailler jusqu’à cet âge, entre les gestes répétitifs et les cadences élevées, les horaires décalés et le travail de nuit. Alors oui, le travail après 60 ans c’est une véritable tentative d’assassinat, c’est la mort par épuisement moral et physique.
N’en déplaise à Olivier Dussopt qui s’émeut des paroles prononcées à l’assemblée et verse des larmes de crocodile sur “chaque mort de trop”, la violence ce sont les centaines de morts au travail chaque année, c’est de mourir à 64 ans, c’est de ne pas pouvoir profiter d’une retraite digne et en bonne santé.
