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Crise climatique

Crise de l’eau : le rapport de l’ONU masque la responsabilité des Etats impérialistes

Les Nations Unies ont publié leur rapport mondial 2024 dans lequel ils alertent sur la crise de l’eau et les risques de conflits liés à celle-ci. Des résultats qui masquent mal la responsabilité des pays impérialistes et des grandes firmes transnationales dans la crise écologique et l’augmentation des tensions géopolitiques.

Lisa Mage

22 mars

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Crise de l'eau : le rapport de l'ONU masque la responsabilité des Etats impérialistes

Crédits photo : Виктор Пинчук, Wikimedia Commons

Le rapport mondial 2024 des Nations unies sur l’eau, publié par l’UNESCO pour le compte d’ONU-Eau, rapporte une aggravation sans précédent des effets de la crise climatique sur l’accessibilité à l’eau. Après l’année et la décennie la plus chaude jamais enregistrée sur le globe, le rapport de l’Organisation météorologique mondiale (OMM) sonne l’alarme en annonçant que la température moyenne à la surface de la terre a augmenté de 1,45 degrés de plus que les niveaux pré-industriels de 1850-1900. Celeste Saulo, la Secrétaire générale de L’OMM, estime en effet que « Jamais nous n’avons été aussi proches – quoique sur une base temporaire pour le moment – de la limite de 1,5° Celsius fixée par l’Accord de Paris sur le changement climatique  ». D’autre projections moins optimistes estiment que nous avons déjà dépassé la limite fixée par les accords de Paris. Une situation qui « menace la paix mondiale », selon le rapport de l’ONU.

Une crise de l’eau sans précédent, symptôme d’une aggravation de la crise climatique

L’année 2023 a été l’année la plus chaude de l’histoire, mais aussi une des plus marquées par de nombreuses catastrophes climatiques. Pour la première fois, le Brésil a recensé plus de 1 000 catastrophes climatiques, soit plus de trois par jour en moyenne. Le mois de juillet 2023 a été le mois le plus chaud jamais enregistré avec un sinistre record absolu atteint le 30 juillet avec 20,96 °C de température moyenne sur le globe. L’été a ainsi été marqué par de violents incendies qui ont ravagé la Grèce, l’Espagne, l’Algérie, le Canada, etc. Le sud-est de l’Amérique du Sud, le bassin amazonien et une grande partie de l’Amérique centrale ont aussi été marqués par un déficit pluviométrique important. Huit États brésiliens ont enregistré, de juillet à septembre 2023, les précipitations les plus faibles depuis plus de 40 ans.

De plus, près d’un tiers des océans mondiaux a été touché par une vague de chaleur marine, endommageant des écosystèmes vitaux et des systèmes alimentaires. À la fin de l’année 2023, plus de 90 % des océans avaient subi des vagues de chaleur à un moment ou à un autre de l’année. Les glaciers mondiaux ont subi la perte de glace la plus importante jamais enregistrée (depuis 1950), en raison d’une fonte extrême dans l’ouest de l’Amérique du Nord et de l’Europe.

Dans ce contexte d’aggravation sans précédent des conséquences du dérèglement climatique, l’insécurité alimentaire et hydrique explose. Ainsi, le nombre de personnes en situation d’insécurité alimentaire aiguë dans le monde a plus que doublé, passant de 149 millions avant la pandémie de COVID-19 à 333 millions en 2023. Entre tous ces drames humanitaires, la crise de l’eau représente peut-être la problématique la plus dramatique. L’Humanité recensait déjà plus de 2,6 milliards de personnes confrontées à une pénurie d’eau de niveau élevé ou extrêmement élevé en Asie-Pacifique. À l’échelle mondiale, c’est 3,5 milliards de personnes qui n’ont pas accès à des services d’assainissement.

Une crise de l’eau aggravée par le dérèglement climatique mais dont les causes se trouvent ailleurs

Une situation dramatique donc, mais dont les mesures hypocrites proposées par les Nations unies cachent bien mal les véritables responsables de la crise hydrique, qui touche de plein fouet des milliards de personnes, en particulier dans les pays sous domination impérialiste. En effet, ce rapport, entre catastrophisme et fausse solution, ne vise qu’à garantir le greenwashing des grandes entreprises qui détruisent l’écosystème pour le profit d’une infime minorité de parasites au détriment de la majorité de la population et de la planète. À titre d’exemple, plus de 70 % de l’eau utilisée en Amérique latine et dans les Caraïbes est absorbée par l’agriculture et on ne compte plus les cas de contamination d’eau dans un contexte de productivisme sans limite. On peut notamment penser au récent scandale de la pollution par des pesticides de 50 à 75 % de l’eau potable des Deux-Sèvres.

Un des cas les plus criants est celui de l’industrie Coca-Cola, qui exploite les nappes phréatiques partout dans le monde en assoiffant les populations. C’est le cas notamment au Mexique où 35 % des personnes vivant dans la capitale ne sont pas connectées au réseau d’eau et 1,3 millions sur les 19 million d’habitants à Mexico n’ont aucun moyen d’accéder à une source d’eau potable. Alors même qu’il faut plus de deux litres d’eau pour faire un litre de coca, l’accaparement des ressources hydriques par les grandes entreprises crée une situation où il revient à moins cher d’acheter un soda plutôt que de l’eau, ce qui pose un problème de santé publique évident.

En effet, en Afrique du Sud, 23 personnes sont mortes du Choléra en 2023, dû à la consommation d’eau non potable. Une situation qui s’explique par le délabrement des réseaux d’assainissement de l’eau, où l’eau claire se retrouve parfois mélangée aux eaux usées en raison de fuites, ou encore à la pollution de sources d’eau. Et la responsabilité des élites locales n’est plus à prouver. Suite à ces morts, la corruption de l’ANC (parti au pouvoir depuis la fin de l’apartheid), au service de la vente du pays aux puissances impérialistes, a été largement mis en avant.

Le cas de Mayotte est aussi un cas d’école sur la question de la pénurie et de la gestion coloniale de l’eau. Suite à l’opération Wuambushu, d’une violence inédite contre les étrangers et les sans-papiers, Mayotte a subi sa pire sécheresse depuis 1997. L’état français avait alors mis en place des coupures d’eau à répétition, mettant en danger l’accès à l’eau potable de dizaines de milliers de Mahorais. Dans ce « département français » ou plus de 80 % de la population vit sous le seuil de pauvreté et où 1/3 des habitats ne sont pas rattachés à un réseau d’eau potable, la gestion néocolonialiste de ce territoire continue de mettre en péril l’accès à l’eau.

Qui menace réellement la « paix » ? L’impérialisme pris à son propre jeu

Alors que la responsabilité des grandes puissances impérialistes et des grandes firmes transnationales dans la crise hydrique n’est plus à prouver, le rapport de l’ONU propose des mesures qui ne règleront en rien la situation. Ces positions soulignent l’hypocrisie de cette instance, financée par le même capital financier qui continue à promouvoir le commerce des combustibles fossiles, la déforestation pour l’agro-industrie et tous les vecteurs du réchauffement climatique.

Ce sont également les mêmes instances qui promeuvent l’agenda extractiviste du capitalisme vert, tout en continuant à réchauffer la planète et à asphyxier les pays sous domination coloniale via la dette imposée par le FMI. Ainsi, alors que l’ONU déclare de manière hypocrite que « pour préserver la paix, les États doivent renforcer la coopération internationale et les accords transfrontaliers », cette organisation continue de l’autre coté à soutenir un génocide en Palestine ou l’eau est utilisée comme arme de guerre, ou encore à soutenir le pillage impérialiste de tous les pays sous domination coloniale que ce soit en Afrique, en Amérique latine ou en Asie.

Les emplois des pays à faible revenus dépendent à 85 % de l’eau, contre 50 % dans les pays à revenus élevés, où le marché du travail est plus diversifié. La pénurie d’eau est donc un cercle vicieux dans les pays sous domination impérialiste, où le pillage des ressources et la corruption empêchent inexorablement les pays d’accroître le niveau de vie des populations. Une situation de crise endémique qui, cumulée à l’augmentation des désastres climatiques, pousse de plus en plus de personnes à fuir leurs lieux d’habitation dévastés. Face à l’augmentation des flux migratoires vers les pays du centre capitaliste, la réponse des États impérialistes, que ce soit en Europe ou aux États-Unis, est claire. Il s’agit de militariser les frontières et d’aggraver encore plus la crise humanitaire dont ils sont, la majorité du temps, responsables. On comprend donc bien que face à une crise climatique et humanitaire sans précédent, c’est le pillage impérialiste des pays de la périphérie capitaliste qui menace la paix.

Face à cela, il est important de souligner que la crise climatique peut être inversée, mais seulement à condition de s’attaquer à ses racines : la manière dont les capitalistes produisent l’énergie, la nourriture, les transports et toutes les sphères de la vie avec pour seul critère le profit immédiat.


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