Crédits photo : Christian Giugliano / FTV
Les Corses mobilisés malgré la répression
Comme depuis plusieurs semaines, le peuple corse s’est mobilisé ce dimanche pour rendre hommage à Yvan Colonna et réclamer le droit à l’auto-détermination de l’île, alors que Darmanin a agité la promesse d’une « autonomie » dans l’espoir de calmer la colère des manifestants.
Derrière deux banderoles arborant le slogan Statu francese assassinu [« État français assassin »], le cortège s’est élancé à Ajaccio vers 15h avec à sa tête le fils d’Yvan Colonna et son frère, venus défendre le combat que le militant indépendantiste n’a jamais renié, même après des années de prison. Face aux 14.000 manifestants, un dispositif policier et répressif impressionnant, qui a conduit à des affrontements.
Au total, on dénombre 2800 tirs de grenades lacrymogènes, de désencerclement et de LBD à Ajaccio, pour une vingtaine de manifestants blessés dont huit ont été transférés à l’hôpital. Parmi eux, une femme a eu le mollet arraché par une grenade de désencerclement.
Une fois la manifestation terminée, des affrontements ont également eu lieu entre les manifestants et les force de répression ont eu lieu. Ils ont duré plusieurs heures jusque dans la nuit « autour de la cathédrale, du Cours Napoléon et de la préfecture et sur l’Avenue du Premier consul, proche de la mairie » rapporte France TV. Des projectiles ont été lancés contre les forces de répression, des véhicules ont été incendiés et un énorme feu de poubelle a enflammé la place Campinchi pendant plus d’une heure.
Manifestation en mémoire d’Yvan Colonna, les premiers incidents ont éclaté devant la préfecture @Prefet2A https://t.co/6nVht3KHpy pic.twitter.com/CCV31N0TVT
— France 3 Corse (@FTViaStella) April 3, 2022
À Furiani vers 17h30, une cinquantaine de manifestants étaient de leur côté réunis devant le caserne où les CRS avaient entonné la Marseillaise pendant l’enterrement d’Yvan Colonna, avant de se faire déloger par des tirs de gaz lacrymogènes.
Une mobilisation qui ne faiblit pas pour Yvan Colonna et l’auto-détermination
La manifestation à Ajaccio démontre que la mobilisation reste importante. De fait, les trois revendications formulées par le Collectif du 9 mars à savoir « la vérité pour Yvan Colonna, la libération des prisonniers politiques via un régime de semi-liberté ainsi que la reconnaissance du peuple Corse dans le débat constitutionnel », n’ont toujours pas reçu de réponse.
La venue de Darmanin qui se disait « prêt à aller jusqu’à l’autonomie » dans le but de canaliser les manifestations n’a évidemment pas porté ses fruits, comme le souligne au micro de Europe 1 un manifestant : « Il a lâché le mot autonomie. Quelques heures après, le Président de la République a dit qu’il y avait des lignes rouges à ne pas franchir. Mais l’autonomie en Corse, sans la reconnaissance du peuple corse, ça n’a aucune valeur. Alors est ce qu’on dit il n’y a pas de tabou et on discute de tout ? Ce n’est pas remettre en cause l’unité de la France, c’est reconnaître une spécificité ».
De fait, les dernières déclarations de Macron au micro de France Inter ce lundi montrent une volonté de jouer le rapport de forces face à une situation qui met en difficulté le président sortant, à quelques jours du premier tour des élections. « Personne n’a engagé l’autonomie » a affirmé le chef de l’État tout en calomniant les manifestants corses avec les petites phrases dont il est coutumier : « ce que j’ai vu ce week-end est inacceptable » a-t-il déclaré avant de soutenir qu’il « n’y aura pas de discussion avec des gens qui se comportent comme ça ».
Malgré l’intensité de le mobilisation qui se poursuit en dépit de la répression, les négociations semblent donc au point mort et l’État use de la force pour faire taire toute opposition. Une manifestante présente à Ajaccio ce dimanche insiste sur la nécessite de poursuivre la mobilisation pour que l’Etat cède aux revendications portés par les corses depuis l’agression d’Yvan Colonna le 2 mars dernier : « Les discussions entre l’État et le peuple corse n’aboutissent à rien. Il faut continuer à maintenir la pression pour que les choses avancent ».
Seule la mobilisation large et unitaire du peuple corse pourra faire plier le gouvernement. Les appels au calme provenant de Macron ou de Darmanin n’ont pour seul objectif que d’endormir les revendications des corses qui ont réussi à obtenir en quelques semaines de mobilisation, notamment de sa jeunesse, plus que pendant des années de négociations au sommet. Pour l’auto-détermination de la Corse, il faut que le mouvement se poursuivent et s’intensifie, avec la solidarité de l’ensemble du mouvement ouvrier et du mouvement social français qui doivent soutenir les revendications légitimes du peuple corse.
