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4 de février de 2023 Twitter Faceboock

Retraites
Le 7 et 8 février, tous les cheminots doivent être en grève pour imposer un autre calendrier
Arthur Nicola

Après deux journées de grève massivement suivies dans le secteur ferroviaire le 19 et le 31 janvier, les fédérations Sud Rail et CGT Cheminots ont appelé à deux jours de grève consécutifs le 7 et 8 février. Un premier pas vers une grève reconductible.

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Crédits photos : le cortège de Sud Rail lors de la manifestation du 31 janvier, O Phil des Contrastes

Si les médias tentent de relativiser la mobilisation des cheminots contre la réforme des retraites, les chiffres sont têtus. Des 566 trains annulés le jeudi 19 janvier (sur un millier d’Intercités et TGV circulant par jour), on est passé à 575 trains annulés le 31 janvier. Un chiffre stable donc, qui montre que chez les cheminots, la réforme est largement rejetée, mais aussi la volonté de lutter contre celle-ci.

Mais après l’annonce de deux nouvelles dates de mobilisation au soir du 31 janvier, pour le 7 et le 11 février, deux fédérations cheminotes, Sud Rail et la CGT Cheminots, ont décidé de proposer 48h de grève, rappelant que « la victoire passera par une intensification de l’action décidée en assemblée générale dans plusieurs secteurs professionnels ». Une volonté de se joindre aux raffineurs, aux secteurs de l’énergie et des ports et docks pour durcir le rapport de force avec le gouvernement dans une situation où le calendrier de grèves carrées de 24h décidé par l’intersyndicale continue de donner le la de la mobilisation. Un calendrier en décalage avec les aspirations de nombreux travailleurs, a fortiori chez les cheminots, qui voient de plus qu’une stratégie se contentant de journées isolées ne suffira pas. Si la CFDT Cheminots se contente d’appeler à suivre la stratégie de l’intersyndicale, l’Unsa ferroviaire, a décidé de ne pas appeler à la grève le 11 février, appelant seulement à la « mobilisation », mais sans appeler à durcir le rapport de forces par ailleurs.

Il faut dire que l’histoire récente des grèves des cheminots montrent que les journées de grèves isolées ou perlées, comme celle contre le pacte ferroviaire en 2018, n’arrivent jamais à faire plier les gouvernements. En revanche, lorsque des mouvements reconductibles ont éclaté, comme en 1986, 1995 ou encore 2019, les travailleurs du ferroviaire ont souvent réussi à faire reculer les gouvernements. La proposition de 48h de grève, si elle est faite dans le sens de construire un mouvement reconductible, nécessaire à l’heure où l’attitude de Macron et ses ministres montre que les actuelles modalités du mouvement ne le feront pas reculer, permet de poser la nécessité d’un plan de bataille « crescendo », à l’image de ce que proposent les raffineurs. Il est plus que jamais important que les cheminots suivent cet appel à la grève, d’autant que trois autres fédérations de la CGT, celle des raffineurs, des ports et docks, et de l’énergie, ont appelé à 48h sur ces mêmes journées. Les 7 et 8 février peuvent et doivent se transformer dans un marchepied vers un mouvement reconductible, accumulant de plus en plus de forces pour un mouvement dur.

Les menaces du gouvernement, par la voix de son ministre des Transports, Clément Beaune, de réformer la loi du service minimum afin d’encadrer davantage le droit de grève, montrent d’une certaine façon la voie à suivre. Ce que craint avant tout le gouvernement, c’est un mouvement de grève qui s’ancre dans la durée dans les secteurs stratégiques, c’est donc bel et bien un mouvement de ce type qu’il s’agit de construire.

Mais pour cela, les appels des fédérations ne suffiront pas : pour élever le rapport de force le plus vite possible, il ne s’agit pas seulement de multiplier les journées de grève. Une journée de grève passée chez soi n’a pas la même valeur qu’une journée de grève passée à se réunir en assemblée générale pour décider, entre grévistes, des suites du mouvement, ou encore à convaincre les non-grévistes de son entreprise ou d’autres boîtes à rejoindre le mouvement. C’est ce qu’expliquait Anasse Kazib, lors de l’assemblée générale de Paris Nord : « pour discuter de grève reconductible, pour voter la grève reconductible, il faut qu’il y ait des gens qui votent. La réalité c’est que pour l’instant le mouvement ne nous appartient pas. Et c’est pour cela que je vous dis que la mobilisation est bizarre. Pour les travailleurs qui ne sont même pas syndiqués, c’est encore pire : ils savent qu’ils n’ont pas leur mot à dire. Mais la réalité c’est que même nous qui avons des responsabilités syndicales nous ne décidons de rien du tout. Il y a dix mecs qui se retrouvent à la bourse du Travail et qui discutent entre eux de la date sur laquelle ils vont se mettre d’accord. Il n’en y a aucun qui sort une consultation, que ce soit à SUD, à la CGT ou à la CFDT. » D’où la nécessité pour l’aiguilleur du Bourget de renforcer les AG, une condition sine qua non pour que le mouvement puisse se transformer en grève reconductible.

Le patronat sait mieux que quiconque que lorsque les ouvriers commencent à se servir du temps libéré par la grève pour renforcer leur mouvement, pour le construire et l’élargir, en alimentant par exemple les caisses de grève, le mouvement est parti pour durer et aller jusqu’au bout. Voter la reconduction de la grève en assemblée générale, aller s’adresser aux salariés des entreprises avoisinantes, remplir les caisses de grèves, mener des actions « coup de poing », tout cela nécessite d’avoir des espaces de discussion et de décision entre grévistes. Des espaces qui doivent aussi dépasser les cadres des entreprises, dans le sens de construire des cadres interprofessionnels. C’est le sens de la proposition des cheminots de Mulhouse, qui on appelé à une AG interpro le 7 février, pour « se coordonner à la base de construire le mouvement localement ». Construire d’ores et déjà les liens entre les grévistes, qu’ils soient cheminots, raffineurs ou énergéticiens, reste une tâche centrale, pour pouvoir dépasser les journées carrées de 24h, mais aussi faire en sorte d’empêcher des grèves par procuration, qui ne suffiront pas pour faire plier Macron.

Pour l’instant, la façon dont l’intersyndicale dirige le mouvement, en attendant le soir des jours de grève pour appeler à de nouvelles journées, empêche les grévistes de décider de leur propre mouvement, alors que c’est bien eux qui perdent des journées de salaire. 48h de grève permettrait de commencer à subvertir ce fonctionnement, en donnant aux salariés, le 8 au matin, l’opportunité de discuter du plan de bataille proposé par l’intersyndicale le 7 au soir, et, si besoin est, d’en proposer un autre, mais aussi de libérer la journée du 8 pour préparer les suites du mouvement.

 
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