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Le RN, un parti xénophobe et anti-ouvrier

Réforme des retraites : pourquoi le RN n’est pas notre allié mais notre pire ennemi

Alors que le projet de loi de réforme des retraites du gouvernement Macron sera examiné à partir du 6 février à l’Assemblée, le parti de Marine Le Pen veut s’afficher comme opposé à la réforme. Pourtant, derrière les dites déclarations, il faut le rappeler : l’extrême droite n'est en aucun cas un allié dans la lutte, il est même notre pire ennemi.

Adèle Chotsky

28 janvier 2023

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Crédits photo : AFP

Le RN : « en même temps » contre la réforme et contre la mobilisation ?

Alors que 93 % des actifs sont opposés à la réforme des retraites, le Rassemblement National s’est positionné également contre la réforme du gouvernement Macron. Ainsi, depuis la présentation de la réforme par le gouvernement Macron, les députés RN affichent dans les médias leur rejet du projet de loi.

Marine Le Pen est bien décidée à incarner la principale force d’opposition à la réforme des retraites face au gouvernement. Invitée sur BFM/RMC ce lundi 23 janvier, la cheffe de file du parti d’extrême droite a ainsi dénoncé la réforme des retraites comme « horriblement brutale » « inefficace » et « injuste pour les Français ».

Malgré ces annonces, il n’est aucunement question pour le Rassemblement national de soutenir la mobilisation. Si ce n’est pas une surprise, la contradiction suivante mérite d’être remarquée. Alors qu’un bras de fer s’est engagé contre le gouvernement, avec une journée de manifestation massive jeudi 19 janvier et d’importants taux de grèves, ce n’est manifestement pas de cette bataille là dont il est question pour les représentants du RN. Marine Le Pen entendait ce lundi sur BFM se positionner comme une opposition raisonnable et responsable à la réforme, en déclarant que « dans une démocratie, mener la bataille, c’est mener la bataille dans les assemblées dans lesquelles on est élu ». Autrement dit, surtout pas sur les piquets de grève ni dans la rue.

C’est un véritable numéro d’équilibriste pour le RN actuellement : il n’est pas possible de se positionner formellement contre le mouvement de masse et les manifestations de rue, vu l’ampleur de celle de jeudi dernier (près de 2 millions de personnes ont battu le pavé dans tout le pays) et vu que 14 % des français « envisagent de façon certaine » de se mobiliser ce mardi 31 janvier. Par contre il s’agit pour les représentants du RN ces derniers jours de critiquer les « blocages ». Le Pen a ainsi ajouté lundi que son parti avait « fait le choix de ne pas faire d’obstruction » à la réforme tandis que Jordan Bardella qui tweetait dimanche dernier qu’il fallait un « référendum » sur la réforme pour « éviter les blocages ». Une façon de proposer de sortir « par en haut » de la contestation.

La méthode du référendum apparaît comme une alternative idéale à la grève et aux manifestations à l’extrême droite qui s’est toujours historiquement opposé aux grèves, aux méthodes de la classe ouvrière et à ses organisations comme les syndicats. Exemple dans les récentes dernières années : en 2019 pendant la mobilisation contre la première réforme des retraites de Macron, le RN parlait de la grève comme d’une « méthode archaïque ».

Le projet du RN sur les retraites : une arnaque pour les travailleurs et le danger de la division xénophobe

Le RN a plus d’une fois mis en avant la promesse électorale d’une retraite à 60 ans, notamment lors des élections présidentielles de 2017. Pendant un temps, le programme du parti comprenait la retraite à 60 ans avec 40 annuités de cotisations. La question des retraites servait de véritable « totem social » pour séduire un électorat populaire. Mais pour la campagne de 2022, la candidate Le Pen a rétropédalé sur cette promesse et montré le vrai visage du parti d’extrême droite : derrière le masque de ceux qui prétendent parler au nom des classes populaires, des politiciens professionnels qui cherchent à donner des gages au patronat et seraient prêts à appliquer la politique voulue par ce dernier s’ils arrivaient au pouvoir.

Par ailleurs, pour les retraites, c’est sur le terrain de la xénophobie et contre l’immigration, une fois de plus, que le RN entend jouer pour permettre un système de départ à la retraite qui bénéficie à ceux que Bardella qualifiait mardi soir sur BFMTV de « la France qui se lève tôt ». Ainsi, face à Olivier Veran, il a déplié son programme en disant qu’il fallait financer ce système de retraites par « par la productivité, par le patriotisme économique, par la priorité nationale ». Des solutions réactionnaires qui visent à diviser les travailleurs entre eux, pour ne pas pointer les véritables responsables : les grands patrons du CAC40 qui se réjouiront de cet appel à la « productivité ».

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Enfin, la proposition du RN d’un « système progressif » est une arnaque totale. Ce que Marine Le Pen défendait pendant la campagne présidentielle était que ceux qui ont travaillé avant leurs 20 ans obtiennent une retraite à taux plein à 60 ans, bénéficiant ainsi d’une amélioration partielle par rapport au régime actuel. Pour ceux ayant commencé à travailler entre 20 ans et 24,5 ans, l’âge de départ se situerait entre 60 et 62 ans, et pour ceux ayant travaillé plus tard que 25 ans, ils devront attendre l’âge d’annulation de la décote, c’est-à-dire 67 ans.

Un projet qui reflète non seulement une volonté assumée d’inciter les jeunes à travailler le plus tôt possible plutôt qu’à étudier, mais qui est aussi une imposture sociale avec des conséquences néfastes sur une grande partie des travailleurs qui devraient se tuer au travail le plus longtemps possible pour espérer bénéficier d’une retraite complète. À la lumière de ces propositions, on voit combien les déclarations contre la réforme actuelle ne sont que de la poudre aux yeux.

Une opposition institutionnelle qui veut jouer dans le cadre du régime

Le RN mène une politique qui en définitive donne des gages aux classes dominantes et s’aligne systématiquement sur les intérêts du grand patronat. C’est ce que reflète son refus catégorique d’augmenter les salaires. Lors du lancement de sa campagne présidentielle pour les élections de 2022, Marine Le Pen réaffirmait ce refus à la télévision et dans son premier meeting, dans le contexte d’une rentrée pourtant marquée par l’inflation.

En mettant les petites entreprises et les multinationales qui s’étaient remplies les poches avec la crise du Covid-19 dans le même sac, elle expliquait que : « augmenter les salaires, cela veut dire faire peser une charge supplémentaire sur des entreprises qui sont dans de grandes difficultés économiques ». Celle qui prétendait « rendre le pouvoir d’achat aux Français » prenait donc bien soin de refuser d’augmenter les salaires, non pas pour répondre aux aspirations des petits patrons, mais pour ne pas froisser le grand patronat.

Un refus d’augmenter les salaires qui s’était déjà exprimé en 2018 lors du mouvement des Gilets Jaunes qui portait l’augmentation du SMIC comme l’une de ses revendications principales. Aujourd’hui, alors que l’inflation atteint des sommets notamment pour les produits de première nécessité et que les salaires qui ne suivent pas sont un des éléments important de la colère qui s’est exprimée ses derniers mois, il est clair que cette politique s’aligne sur celle, anti-ouvrière, du reste du champ politique.

En effet, le Rassemblements national entend bien occuper aujourd’hui une position institutionnelle, qui s’assure les faveurs d’un électorat de droite hostile au « désordre » et à la contestation. Cette opposition institutionnelle au gouvernement se traduit par l’activité des députés du RN à l’Assemblée, « bons élèves » du travail parlementaire depuis leur arrivée dans l’hémicycle lors des dernières élections : un élément central de la stratégie de normalisation du parti d’extrême droite, qui entend jouer à fond la carte de la responsabilité et de l’opposition raisonnable.

C’est ainsi que les députés RN voteront donc tout de même pour l’une des mesures de la réforme Macron, celle sur le minimum retraite (mesure à l’utilité plus que relative puisqu’elle ne concernera qu’un nombre dérisoire de retraités). Le député Jean-Philippe Tanguy jouait à fond ce rôle de l’opposition constructive en justifiant sur France Inter ce vote par le fait que son parti « n’est jamais dans la politique du pire donc cette disposition là on la soutiendra ».

Derrière le vernis social et le discours opportuniste, le RN défend donc bien les intérêts des classes dominantes quand il s’agit de faire front contre les grévistes, contre les hausses de salaires et contre la contestation sociale. Une politique réactionnaire au service du grand patronat, qui montre que malgré ses discours démagogiques l’extrême droite n’est en aucun cas l’allié des travailleurs face à la réforme des retraites et face au gouvernement. Au contraire, en cherchant à diviser les travailleurs entre eux, il est même notre pire ennemi.


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